Sofiatinden

Sofiatinden est une montagne des plus populaires pour le ski dans les Alpes de Lyngen . Magnifique sommet panoramique culminant à 1222 m et accessible par un couloir de 400 m à 35/40° en Sud.

© Photos et textes : C. Dussoliet – illustration : V. Thiebaut

Dré, je te dis, et puis Nord, faut pas gâcher

Tout commence par un petit malentendu ce matin. Vincent a réservé les deux hébergements du samedi 30 mars au samedi 7 avril, ici, et ensuite au pied des plus hauts sommets à Lakselvbukt jusqu’au dimanche 14 avril. Ce matin, dans la bonne humeur générale, nous défaisons nos lits, préparons nos bagages, vidons les armoires et la cuisine, rassemblons nos affaires de ski et tout le matos montagne, tout cela pour un départ programmé vers 10h30. Direction Lyngen Sud pour vivre d ‘autres expériences là-bas et si possible commencer par une première sortie en fin de journée. Pas de panique, tout le monde est sur le pont et chacun fait sa part… Vincent range ses dernières affaires dans le salon, topos, câbles et papiers récapitulatifs du voyage. Et là, il tombe sur la résa du deuxième lodge. C’est bien du 7 au 14…. mais le 7, c’est dimanche et pas aujourd’hui samedi !

“Désolé les gars, on stoppe tout. Tout le monde récupère ses draps mis en tas, car on dort encore une nuit ici”… Sans filtre ! … “Mais c’est une blague, tu déconnes… Non, malheureusement, je me suis planté !”

Je réagis de suite. “On refait nos lits, on mange des féculents, on va skier”. Tout le monde est d’accord sur le principe sauf pour la dernière proposition. Après le déjeuner, seul Philippe, au repos hier, m’ accompagne dans une petite virée. Bien repéré, Sofiatinden est une belle destination à faire à deux, un sommet inscrit sur notre liste de course.

Pendant que Vincent taquine le hareng, Je suis parti avec Kiwi, c’est le petit nom que je donne à Philippe. C’est un départ identique à Sultinden, la voiture est garée à Risvoll. Les premières centaines de mètres sont doux en montant dans le cirque. En suivant la rivière Løberg par la droite et la vallée de celle-ci jusqu’au point 500 m. La trace se poursuit dans la combe entre les sommets de Sofiatinden à gauche et Sultinden au fond à droite. Le pas et le rythme à deux sont plus fluides. À un peu moins de 800 m, ça devient plus plat. Nous longeons les couloirs qui se succèdent. Je choisis de tracer à gauche du couloir principal, dans un couloir plus proche d’une face que d’un couloir, tellement les possibilités sont envisageables. Plus nous montons, plus le profil se raidit, un bon 30°. Nous traçons à ski 1/4 du couloir. Même si parfois, il est possible d’atteindre le sommet à ski, nous décidons de continuer en crampons, pour une ligne esthétique « dré dans le pentu » jusqu’au sommet dans un neige parfois béton (anciennes traces de skis), cassante ou poudre. C’est certainement plus efficace dans ce type de neige et surtout dans les sections raides, largement au-dessus de 35 degrés. J’arrive au sommet, sur cette crête escarpée avec de belles corniches qui se prolongent vers Store Sofiatinden. Après une petite attente bronzage en haut, pour une fois peu venté, Kiwi me rejoint. Seuls tous les deux, nous mettons à profit quelques minutes de “recup” pour profiter de la vue. C’est majeur, face à bon nombre de sommets de Lyngen : Stortinden, Sultinden, Store Jægervasstinden, Store Lenangstinden, Trollvasstinden et même Jihekkevarri au sud..

En face sud, la neige s’est transformée. Nous descendons en bordure du couloir principal de montée ou l’on trouve une partie vierge et très agréable à skier. Une fois arrivés dans la combe, Kiwi préfère rejoindre le bas de la vallée et pour ma part, je décide de remonter en face vers une fenêtre bordée de rochers par une trace existante. S’ensuit une course aux Italiens en face, faut pas déconner non plus, j’ai faim de peuuuufff ! dans cette pente nord. Remonté comme un coucou des Aravis, je les rejoins alors qu’ils commencent leur descente et seul, trace le haut du couloir à pieds dans une pente à 35°. L’endroit à gauche du sommet du Sultinden est esthétique, l’arête toute proche, l’ambiance est y grandiose. Du haut de ce promontoire, je décèle au sud une faille et un couloir raide qui descend jusqu’au début de la vallée de Tyteberdalen. Comme un abruti, je ne pense pas à appeler Kiwi à la radio et me “coupe l’herbe sous le pied”, des fois je ne suis vraiment “pas tout-là” … certains le savent déjà. Les conditions sont bonnes dans ce couloir et ça sort sans problème. Faute de pouvoir le prévenir, impossible de retenir cette option, le couloir étant de l’autre côté de l’arête, Kiwi n’a aucun visuel sur moi. C’est avec regrets que je ne mettrai pas aujourd’hui à mon actif un troisième couloir “Kinder surprise”. La descente en face Nord est excellente sur 250 mètres. Je rejoins Kiwi qui m’attend à la sur le plateau depuis peu, nous finissons la descente ensemble, sereins et heureux de cet après-midi.

Pendant ce temps, Vincent et quelques volontaires ont fait quelques tentatives de pêche dans le port, mais le vent et le froid ont eu raison de notre patience. Au leurre ou à la cuillère, les poissons norvégiens n’ont pas mordus à leurs espérances. Heureusement le sauna est une valeur plus sûre, où l’on se remémore toutes nos bonnes descentes et sommets de cette première semaine.